Un polar transgenre
Hybride. C’est le terme parfois employé pour qualifier mon premier roman. Un mélange de polar et de littérature blanche. De fait, il y a des meurtres, un assassin, des enquêteurs. Mais, il y aussi des personnages dont j’aime développer la psyché, décrire le quotidien tout comme leurs états d’âme et leurs relations interpersonnelles… J’aime aussi tenter de capter l’air du temps, des faits de société, les dysfonctionnements de notre époque… Le risque : ne pas plaire aux amateurs du genre et ne pas attirer les lecteurs de littérature classique.
En ce qui concerne les premiers, le « risque » se vérifie. Sur Babelio, on peut lire : « [Le Chat qui ne pouvait pas tourner] fait penser à des centaines d’autres polars déjà présents en librairie et c’est bien le problème de ce premier polar. Il souffre de deux défauts qui ne sont en rien rédhibitoires mais qui empêcheront tout amateur de polar de lui trouver un quelconque intérêt. Dès les prémices de l’enquête, le lecteur comprend qu’il est face à un polar d’un classicisme absolu, etc. etc. ». Cependant, la même personne écrit plus loin : « Ces défauts n’empêchent pas de passer un bon moment. L’intrigue se suit sans déplaisir à travers des chapitres rythmés… ». Tout n’est donc pas perdu.
Ce qui est intéressant à constater, c’est la hiérarchie des critères pour apprécier un livre. En haut de la liste semble-t-il : « correspondre à ce qu’on attend d’un polar ». Plus bas : « prendre du plaisir à la lecture ». Dont acte. Un autre internaute écrit également : « Pour un passionné du genre, je pense que ce roman le laissera sur sa faim. Pour un novice, il prendra peut-être plaisir à le lire ». Le gap entre les uns et les autres se confirment donc… Car, toujours sur le même site, une lectrice commente : « Je ne suis pas une grande lectrice de policiers et pourtant, j’ai beaucoup aimé ce roman. Le capitaine de police David Sterling a tout d’un grand chef d’enquête : séduisant et à la fois plein de fêlures, on n’en friserait presque le cliché. Et pourtant, cela fonctionne ! ».
Dans mon entourage, c’est plutôt l’enthousiasme qui prime. Même si des critiques ont pu être émises. Des critiques constructives et bienveillantes générant des échanges passionnants sur mes personnages, certains rebondissements, etc. Parmi les retours, il y a également des réflexions sur le genre : « Je l’ai lu comme un polar. Mais ce n’en n’est pas vraiment un. J’ai envie de le relire en m’ôtant cette idée de la tête ». Ou encore : « Au début, ça semble être un polar classique. Et plus on avance, plus cela devient original. Tout comme le personnage de Sterling [le héros], bien plus complexe que ce qui transparait dans les premières pages. » J’avoue être particulièrement touchée par les personnes qui me disent « je l’ai lu d’une traite », « jamais ennuyeux », « j’ai envie de lire la suite ». Par celles aussi qui évoquent mes personnages comme s’ils faisaient désormais partie de leur cercle proche. Parce que c’est sans doute ce qui m’anime en tant que lectrice.
Le livre vient de sortir. Trop tôt pour tirer une quelconque conclusion. Trop tôt pour savoir si le pari de l’éditeur sera couronné de succès. Le pari en question, c’est vendre un polar à des passionné.e.s de ce type de littérature mais aussi à des personnes qui n’en lisent pas forcément… Bref, ériger un pont entre les genres – je ne suis évidemment pas la première à le faire – et séduire un « lectorat populaire » (dixit mon éditeur). Un pari difficile à réussir dans un pays adepte des catégories et des étiquettes. Mais pas impossible…