MENU FERMER

De la capacité d’adaptation

Journaliste indépendante rime souvent avec pluralité de sujets et d’univers. Mais il y a des jours où cette diversité d’interlocuteurs et de projets culmine. Il en va ainsi de la semaine dernière. Lundi : je travaille sur un numéro de la collection « Nous, jeunes » dédié au mutualisme. Je retranscris l’enregistrement de deux ateliers ayant réuni des jeunes d’horizons variés qui ont débattu de la modernité de ce mode d’organisation, les valeurs qu’il sous-tend, etc. L’après-midi, je me rends chez mon éditeur (le groupe Gallimard) pour évoquer la sortie de mon prochain livre sur l’engagement des jeunes et les podcasts qui accompagneront sa publication. J’y travaille à nouveau mardi. Mercredi, je me rends à Inditex (groupe Zara) pour animer une partie de Héroïnes. En face de moi, des jeunes de trente ans environ, surtout des femmes. Nous sommes dans l’univers de la mode et en plein Paris. J’enchaîne l’après-midi sur une réunion à Epinay-sur-Seine (93), dans le cadre de ma résidence de journaliste, dans une médiathèque de la ville. Sont présents : des jeunes au parcours difficile, des animatrices (bibliothécaire, éducatrice PJJ, salariées d’associations) engagées… Ambiance radicalement différente. 

Jeudi, rendez-vous dans une des plus grandes écoles de commerce pour évoquer la rédaction d’un livre blanc (je ne peux déflorer le sujet). En face de moi, quatre hommes ayant fait carrière dans l’enseignement supérieur. Vendredi, deuxième séance de travail avec des aides-soignantes en formation pour avancer sur un projet de journal, « Nous, jeunes ». On évoque les joies et les difficultés de ce métier, le manque de reconnaissance, la fin de vie…

J’ai choisi d’être journaliste pour qu’aucune journée ne ressemble à une autre. J’ai été particulièrement servie la semaine dernière. Et même si jongler avec ces différents interlocuteurs et la diversité des projets n’est pas toujours simple, je trouve toujours aussi enthousiasmant de m’adapter à chaque situation. Enthousiasmant et salutaire pour l’esprit de procéder à cette gymnastique intellectuelle, qui permet de maintenir intacte l’ouverture au monde. 

Et puis, dans chacun de ces univers je me sens bien, à ma place. Peut-être est-ce lié à mon éducation ? Petite, mes parents ne m’ont jamais fait manger à part avec d’autres enfants. Quand ils invitaient des personnes à dîner, j’avais droit à la parole et celle-ci était écoutée au même titre que les autres. Fille unique, j’ai très vite investi l’amitié, mon cercle de connaissances était large. Mes parents vivaient en communauté quand je suis née. Et même si l’expérience n’a pas duré longtemps après qu’ils soient devenus père et mère, ils ont gardé longtemps ce goût du collectif. Je suis le fruit de cette éducation des années 70 où les appartements étaient ouverts, les référents adultes multiples, les milieux moins étanches. De quoi entretenir une certaine capacité d’adaptation et un goût certain pour l’altérité…